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Militant socialiste de Concarneau
17 novembre 2009

la démocratie participative

Vous êtes élu(e) d’une collectivité locale, vous êtes à l’initiative d’une démarche participative, vous devez mener une concertation avec la population sur un projet local, ou prendre part à un débat public sur un projet d’aménagement

Les objectifs assignés à la démocratie représentative doivent être clarifiés avant de s’engager dans la démarche, ou explicités pragmatiquement en cours de démarche, d’abord parce qu’ils conditionnent le choix des dispositifs et des moyens. Ensuite parce que cela permet d’éviter des malentendus et de susciter des attentes qui ne pourraient pas être satisfaites. Enfin, pour évaluer, il faut savoir ce que l’on cherchait.

I. Les objectifs

Le terme générique de démocratie participative ou de proximité sous-entend une grande multiplicité d’objectifs avancés par les acteurs. Pour mieux s’y repérer, je voudrais les regrouper en fonction de trois grands axes (il s’agit bien sûr d’une simplification), qui ne sont d’ailleurs pas tous systématiquement présents dans les pratiques examinées. Il s’agit d’améliorer la gestion des services, d’agir sur le lien social, de développer la démocratie.

La France a ceci de spécifique que, très souvent, ces trois axes sont menés ensemble dans les démarches locales. En Allemagne, par exemple, l’axe de développement de la démocratie est la plupart du temps absent. Dans d’autres pays, les articulations sont un peu différentes.

L’amélioration de la gestion locale

En France, l’idée dominante est que pour mieux gérer, il faut gérer avec le citoyen, dans la proximité. Cela permet de mieux connaître les besoins de la population, d’augmenter la communication entre élus et administrés et entre techniciens et usagers, ainsi que d’intégrer les savoirs et les compétences d’usage des habitants sur des problèmes qui les concernent directement. Les habitants ont des savoirs pratiques : où doit passer la ligne de bus, ce qui convient le mieux pour les jeux d’enfants, quel carrefour est dangereux, etc. La participation est un moyen d’accroître la transparence de l’action publique et sa lisibilité par les usagers pour rompre avec la corruption, rénover la qualité du service public, lever les soupçons de bureaucratie ou d’inertie. Plutôt que de s’en remettre à un modèle marchand reposant sur le couple coût / rentabilité, l’idée est qu’il faut responsabiliser le service public devant ses usagers. Pour les collectivités locales, cela passe par des conseils de quartier.

Agir sur le lien social

En France, en particulier dans les quartiers en politique de la ville, une conception assez partagée veut que la participation crée du lien social. La contribution des conseils de quartier et des démarches participatives au rétablissement du lien social ou de la paix sociale peut être importante, en permettant le développement de la communication et de la discussion entre différents groupes et individus.

En se parlant, on favorise la tolérance, la création du consensus, la prise en compte des besoins des uns et des autres. Des espaces publics locaux sont nécessaires, dans lesquels les gens peuvent échanger et discuter. C’est vrai entre élus et habitants, mais aussi entre les habitants. On retrouve cet objectif social dans d’autres pays, par exemple au Brésil, où la participation est moins un moyen de rétablir la paix sociale que d’inverser les priorités et de mettre en avant celles des classes populaires, traditionnellement négligées dans l’action publique locale.

Favoriser la démocratie

Au contraire d’autres langues, le français maintient une ambiguïté sur le terme « politique », au contraire de l’anglais qui distingue entre politique publique et politisation. C’est cette dimension sur laquelle je voudrais insister. Cet objectif est en

général présenté assez confusément ou de manière très générale (la citoyenneté), sans forcément définir les objectifs précis qu’on veut atteindre sur ce plan.

Il peut s’agir :

- de développer une culture civique ou démocratique dans ce qui ferait des conseils de quartier des écoles de démocratie : à partir du concret quotidien, on peut développer l’intérêt des citoyens pour la chose publique en entendant les points de vue des autres habitants, des élus et des personnels administratifs.

- D’insérer la participation des citoyens dans le processus de la prise de décision : c’est la « démocratie directe », où des éléments de démocratie participative se combinent avec ceux de la démocratie représentative.

- D’encourager la politisation des problèmes : à partir du quotidien, on peut poser des problèmes de société. Cette problématique est présente en France, mais, lorsqu’on examine les fonctionnements de conseils de quartier, on s’aperçoit que les individus qui les composent ne sont pas tous reconnus légitimes lorsqu’ils essayent de poser les problèmes de fond, notamment les problèmes politiques. Souvent, seuls les élus, maire ou adjoints, peuvent exprimer des généralités et poser les problèmes au niveau municipal ou national.

- De renforcer l’adhésion au système politique institutionnel et sa légitimité : améliorer la gestion ou favoriser le lien social procure chez les citoyens la sensation subjective d’être associés à la prise de décision, d’être des citoyens écoutés.

Des difficultés persistent toutefois et des résultats apparaissent contrastés sur chacun des objectifs. En l’absence d’évaluation globale, c’est plus à travers des observations directes et des discussions avec des acteurs ou des observateurs que j’avance quelques hypothèses.

La gestion de proximité exige d’abord d’informer, car en l’absence d’une information accessible, lisible et largement diffusée, la démarche ne fonctionne pas. Il faut ensuite une discussion de qualité basée sur des procédures, permettant un apprentissage du dialogue qui est loin d’être spontané. Il faut enfin répercuter l’information et les discussions dans la prise de décision concrète, et cela ne se fait pas de façon simple avec nos organisations administratives. La modernisation de l’action publique est un défi lent, nécessitant une réorganisation en profondeur des modes de gestion. C’est sur cet objectif que les résultats sont pourtant les plus probants et les plus concrets. Pour peu que soient mises en place une véritable transversalité dans les services municipaux et une territorialisation des responsabilités du technicien ou des élus, on assiste souvent à des résultats sensibles reconnus par les participants.

Sur le deuxième objectif, celui du lien social, on considère souvent de manière trop harmonieuse les relations entre habitants. On donne à croire qu’à partir du moment où les gens vont discuter, un consensus va se dégager, la paix sociale s’installer. Il semble que la possibilité du conflit soit sous-estimée et que, quand le conflit s’exprime, il soit vécu comme un échec, un dérangement, une menace, un danger.

Deuxième difficulté, l’absence massive ou la sous-représentation de certaines catégories sociales : les jeunes, les populations les plus précaires, issues de l’immigration et plus généralement les catégories les plus populaires. Et lorsqu’elles sont présentes, ces populations interviennent peu. L’objectif de rétablir le lien par le dialogue s’éloigne, ceux qui perturbent l’ordre sont des objets de discussion plutôt que des interlocuteurs.

Sur le dernier objectif, politique, la participation partielle et parfois quantitativement faible, est également un problème. D’autre part, l’absence de règles claires – qui décide ?, de quoi ?, comment ?, par quels mécanismes les discussions sont-elles traduites en action effective ? – reste sans doute l’une des plus grandes difficultés. De même, la question du droit à politiser les questions, sans être mal vu par les participants, n’est pas simple.

Dernier risque, celui de la récupération et de la création de structures assez coupées des citoyens, où il est davantage question d’image que de codécision ou d’association à la décision.

II. Les dispositifs

Aux côtés de différents types de dispositifs de conseils de quartier, largement décrits dans cet ouvrage, je voudrais signaler rapidement d’autres dispositifs, moins développés en France que dans d’autres pays : les jurys ou les conférences de citoyens. Ceux-ci sont désignés par tirage au sort, non parmi les volontaires mais, comme pour les jurys d’Assises,

parmi la population, et donc parmi des gens qui ne sont pas forcément volontaires. Cette structure, réunie en partie en sessions publiques, émet un avis ou prend une décision. Par exemple à Berlin, le jury de citoyens, prend une décision sur une enveloppe locale.

Il faut également citer les formes de consultation directe de toute une population : le référendum d’initiative locale ou les sondages massifs. Techniquement, de tels sondages n’ont que peu d’intérêt. Un sondage classique semble préférable, sauf lorsqu’on cherche à créer « un premier moment » de vaste discussion, ou lorsque la démarche est couplée avec d’autres outils dans une logique participative. La valeur recherchée est ici plutôt politique que technique. Évoquons aussi le budget participatif 2. En Amérique latine, le budget participatif mobilise surtout les classes populaires, alors qu’en France, ce sont plutôt les couches moyennes qui s’investissent d’abord dans les démarches participatives.

III. Démocratie de proximité, démocratie participative, démocratie représentative

La distance entre le monde politique et le citoyen grandit. L’idée de les rapprocher connaît une popularité croissante. Elle est à la fois politique et fondée sur la proximité territoriale du quartier, voire du micro-quartier, sur lesquels les gens peuvent avoir des idées et discuter de façon réelle avec les élus. Le choix des mots n’est pas neutre. Démocratie de proximité et démocratie participative ne veulent pas forcément dire la même chose. Des choix politiques différents dirigent la façon de concevoir les dispositifs. Ainsi, dans les débats concernant la loi Vaillant au Parlement, on a pu distinguer trois grandes positions des parlementaires.

La première est dite « républicaine ». Elle exprime une position de méfiance a priori à l’égard des conseils de quartier dont elle dénonce le risque du particularisme. On la trouve chez le MDC, une partie du RPR et de l’UDF, qui voient dans les conseils de quartier une légitimité accordée aux égoïsmes de quartier, au risque de fractionner la ville et de perdre de vue l’unité de l’intérêt général. Citons un député UDF : « Le pouvoir s’est éloigné des préoccupations de nos concitoyens; ceux-ci ont parfois l’impression qu’entre deux élections, leur pouvoir de décision est confisqué. » Le député reconnaît donc la distance, mais ajoute aussitôt : « Les deux mots de proximité et de démocratie sont un pléonasme, la démocratie est le gouvernement du peuple par le peuple, pourquoi le peuple voudrait-il se rapprocher de lui-même ? » Il faudrait donc faire un diagnostic du lien entre administrés et administrateurs…

La seconde problématique est celle portée par le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin et une partie de l’UDF qu’on qualifiera de « démocratie de proximité », pensée comme complément à la démocratie représentative. Il s’agit de régler clairement les responsabilités de l’une et de l’autre pour éviter des conflits de légitimité. Pour ce faire, il est préférable

qu’un conseil soit présidé par un élu pour marquer le caractère premier de la démocratie représentative ; et qu’aucun pouvoir décisionnel ne soit délivré au dispositif. Le conseil est essentiellement une interface entre élus et habitants. Différence avec les « Républicains » : les intérêts particuliers sont ici reconnus comme légitimes et il est jugé nécessaire que les intérêts des différents groupes et quartiers s’expriment. Mais si la démarche participative peut faire surgir les intérêts particuliers, c’est ensuite aux élus d’effectuer la synthèse et d’incarner l’intérêt général. Selon cette approche, si l’on reconnaît que les citoyens sont capables de dépasser leur propre point de vue en le confrontant à celui des autres, seuls les élus peuvent approcher l’intérêt général au niveau de la ville ou de l’agglomération.

CONSEILS DE QUARTIER



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